C’est aux Rencontres internationales du documentaire de Montréal que Julie Perron (Mai en décembre (Godard en Abitibi),Lucie de tous les temps, Pierre Gauvin, un moine moderne) lancera son nouveau film Le Semeur, en compétition nationale pour le meilleur long métrage. Produit par la cinéaste (Productions Les Films de l’Autre) et tourné principalement à Kamouraska, ce film propose une incursion dans l’univers de l’artiste-semencier Patrice Fortier. Créateur de La Société des Plantes, Fortier préserve des semences végétales rares ou oubliées. Son but : créer les variétés anciennes du futur, un travail de moine que la cinéaste a su rendre avec sensibilité et émotion. Distribué par Les Films du 3 mars, Le Semeur prendra l’affiche au printemps 2014 à Excentris.
Filmer Le Semeur
Comme en font foi ses films précédents, Julie Perron aime les êtres non conformes et s’applique à les scruter avec sa caméra. La cinéaste mène ce projet comme on porte la semence de siècle en siècle, le laissant mûrir à point et filmant le temps qui s’égrène avec grâce et lenteur. La démarche de la cinéaste et du semencier a ceci en commun qu’elle s’effectue sur la durée : il a fallu quatre ans pour faire éclore ce film, le même temps que nécessite la sauvegarde d’une variété oubliée.
« J’avais envie de faire un film où l’aspect sacré du travail de Fortier se retrouverait au cœur de chacune des images, explique la cinéaste. J’ai voulu que le spectateur s’emplisse de la beauté de cette nature à laquelle le semencier rend hommage et constate l’importance des gestes qu’il pose pour préserver sa richesse et sa diversité. Autrefois, les paysans plantaient les semences issues de leur récolte, ce geste ancestral tend à disparaître en ces temps où le vivant se brevète. Il était donc crucial pour moi de célébrer les gestes du semencier pour les réactualiser et ainsi rappeler qu’aujourd’hui, replanter une semence est un acte de résistance. »
Un cinéma d’observation et d’accompagnement
Pour la cinéaste, il était tout naturel de privilégier un cinéma artisan pour accompagner le travail du semencier, qui évoque celui des copistes du Moyen-Âge. En filiation avec la tradition du cinéma direct québécois (notamment César et son canot d’écorce de Bernard Gosselin) et français (Portraits d’Alain Cavalier), Julie Perron a accordé une grande importance à l’observation des gestes, au cadre, à la lumière et à la couleur, en choisissant minutieusement avec ses caméramans ses angles de prise de vues afin de restituer le mieux possible la relation entre l’homme et la nature et en s’inspirant des grands maîtres de la peinture. Le titre du film fait d’ailleurs référence au célèbre tableau de Jean-François Millet (1851) revu par Van Gogh (1889).
Douce folie
Patrice Fortier est aussi un semeur d’idées, un résistant visionnaire qui porte plusieurs rêves. Outre le travail méticuleux du semencier, le film aborde la douce folie de l’artiste aussi bien que son exubérance. Formé en arts visuels, Fortier transforme en effet ses récoltes en projets artistiques. Par exemple, son œuvre Portraits de Blanche à Collet Vert, propose une réflexion sur le processus de sélection. Fortier invite donc à la préservation de variétés anciennes comme manière de célébrer la pluralité dans le monde.
Ode à la biodiversité végétale et au patrimoine porté par un semencier original et génétiquement motivé, Le Semeur de Julie Perron est le dernier opus d’une cinéaste connue pour ses portraits de femmes et d’hommes, visionnaires ou utopistes, qui nous invitent à rêver et donc, à progresser...
LE SEMEUR de Julie Perron aux RIDM (durée : 77 minutes)
PREMIÈRE MONDIALE – COMPÉTITION NATIONALE LONGS MÉTRAGES
SÉANCES : Dimanche 17 novembre à 19 h 15 au Cinéma du Parc 3 (68)
Vendredi 22 novembre à 20 h 30 à Excentris (Parallèle) (142)
RIDM, films d'ouverture le 13 novembre et de clôture le 23 novembre
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire