vendredi 16 mars 2012

FICTION NOIRE : L'année-lumière de Giuseppe Genna

Un numéro deux de grande entreprise qui est prêt à tout pour buter le premier et tenir la première place, le numéro un qui ne veut pas nécessairement la lui laisser, en tout cas pas avant de..., un affairiste qui s'amuse à détruire la vie des autres parce que c'est là son métier et il veut réussir, le Vatican, le cercle polaire, Las Végas, tout y passe.

De sa prose dure qui devient poétique, l'auteur nous fait rigoler pour mieux nous rattraper dans le drame le plus intimement ressenti. Il nous raconte comment peuvent se passer les renversements, la business, les grands bouleversements qui appauvrissent les petites gens.

Si la plus grande part de l'action en stratégies destructrices revient aux Italiens de Milan d'où est originaire Giuseppe Genna, il réserve aux cardinaux du Vatican et aux Anglais une part importante du drame, sans oublier au passage les Sud-Africains, les méchants Russes, Étatsuniens et Canadiens. Dans cette fiction, il s'agit avant tout de conquérir le monde quelle qu'en soit la manière, la planète peut crever, les vainqueurs trouveront bien le moyen, avec leurs moyens acquis de manière abjecte et au dépens des autres ou de ceux qu'ils côtoient quotidiennement, de s'en aller sur Mars.

En attendant de réussir leurs coups, tous ces hommes font grand usage des moyens qu'il faut pour raffermir leur membre, le grand patron éternel enfant prend son pied avec des jeuneots, le numéro deux passe aussi beaucoup de temps dans les chambres d'hôtel, les infirmiers ont des pratiques douteuses et le chien de la maison s'appelle Homo.

Ce livre, c'est une fiction hyperréaliste sur les rachats de sociétés et les empires des télécommunications, un roman que j'emmènerais sur une île déserte pour me rappeler de ne pas retourner là d'où je suis partie ou que je laisserais volontairement dans un lieu que je quitte pour ne pas amener les fourbes là où je pars...

Mais comment savoir ce qui se trame autour de soi, de nous tous ? Qu'est-ce qui motive cette génération des 40-50 ans ?

L'Année-lumière de Giuseppe Genna est une lumière, oui, mais une dure lumière noire à lire pour ouvrir les yeux, une lumière abjecte sur l'abjecte monde pour ne pas laisser de côté les gens qu'on aime tout en faisant confiance à des gens qui ne nous entourent que pour mieux nous détruire à leur profit, que pour réussir sur notre dos, que pour s'emparer de ce que l'on a construit sur tant d'années de désir et de volonté.

L'AUTEUR
GIUSEPPE GENNA, né à Milan en 1969, est l’un des auteurs italiens les plus reconnus de sa génération. Après un parcours consacré à la philosophie et à la poésie, il publie une douzaine de romans noirs dont trois ont été traduits en France : Sous un ciel de plomb, Au nom d’Ismaël et La Peau du dragon (Grasset).

EXTRAITS

« Voilà ce qu'est pour nous l'apocalypse des écologistes : un stimulus. » (p.19)

« - On va tous les enculer ! Pas même une part de gâteau, pas même une miette à celui qui n'est pas avec nous ! Nous sommes les seuls. » (p.20)

« “Omo!” C'est comme si, en anglais, on donnait au chien le nom Gay, en croyant le baptiser “Joyeux”. » (p. 38)

« Le jeune Russe, le responsable italien du marketing que Mental regarde de travers... » (p.86)

« On crée de la confusion, de l'incertitude, du doute, de la peur. » (p.88)

« La Comtel anglaise et la Komtel italienne ont bien caché les trous du bilan, les détournements de flux d'argent, les investissemts occultes, les fausses factures. » (p. 91)

« Une exigeance, celle-là, qui devient totalisante, féroce, exigeante. » (p.112)

« Sur le travail, elle était irréprochable. » (p. 116)

« Et les politiques, comme le sénat romain avant l'écroulement de l'Empire, craignaient plus pour eux-mêmes que pour le bien commun. » (p.123)


Excellente lecture, roman noir totalement actuel. Une lumière qui n'en éclaire que quelques-uns, une année du plus grand abîme...


Publié aux éditions Métailié, collection NOIR.




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