mardi 13 mars 2012

LIVRES - HISTOIRE : la crimi en Nouvelle-France

Sans différends, point d’harmonie . Repenser la criminalité en Nouvelle-France
On s'imagine toujours les autres plus heureux que soi; on imagine la vie de nos ancêtres douce et tranquille... C'est l'heure de se détromper.
Les Québécois - ou plutôt les colons ayant immigré pour coloniser cette nouvelle terre d'Amérique - n'étaient pas plus heureux ensemble, ne s'entendaient pas mieux et n'étaient pas plus infiniment honnêtes à l'époque d'avant la Conquête que maintenant. C'est une jeune historienne, Josianne Paul, qui a soulevé la poussière de nos archives judiciaires sous le Régime français pour s'en rendre compte. Elle publie maintenant le résultat de son travail de recherches dans ce nouveau live intitulé Sans différends, point d’harmonie . Repenser la criminalité en Nouvelle-France, publié au Septentrion, Québec.

Escarmouches, injures, querelles, crimes...
Escarmouches au cabaret du coin, paroles injurieuses prononcées à la clôture contre un voisin négligeant, querelles pour la vente d’aliments avariés au marché, chicanes de ménage, viols, maltraitance envers les jeunes garçons et envers les femmes, malhonnêteté en affaires, et manigances de toutes sortes pour éloigner l'amoureux ou l'amoureuse considérée incompatible par quelque membre de la famille... bref, elles et ils en voyaient de toutes les couleurs.

Montréal aux 17 et 18e siècles
En adoptant une méthodologie située à la croisée de l’histoire et de la criminologie, Josianne Paul a voulu se mettre à hauteur d’homme afin de comprendre comment, aux 17e et 18e siècles, les habitants de Montréal et l’administration coloniale géraient les situations conflictuelles potentiellement criminalisables auxquelles ils devaient faire face.

Procès civils, actes criminels, crimes contre le roi... 
L'ouvrage fournit nombre d'exemples concrets concernant des conflits ayant été portés aux tribunaux de l'époque : les crimes de lèse-majesté. les situations d'honneur, les relations entre bailleurs et fermiers-métayers, les relations entre collègues du même niveau ou ordre professionnel, les relations entre employés incluant les relations amoureuses ou haineuses au travail, prêts d'outils, les bailleurs de fonds, les employeurs en non-paiement de salaires, les relations entre marchands-artisans et clients, les rassemblements publics...

Ils insultaient leurs femmes
L'historienne a par ailleurs constaté que « dans certains cas, les injures offensant l’honneur féminin n’étaient que l’aboutissement d’un désaccord qui avait dégénéré (p. 69). Donc, lorsque les affaires entre hommes prenaient une mauvaise tournure, les insultes allaient-ils (parfois / souvent / toujours ?) en direction des femmes. Est-ce que cela terminait le conflit ou est-ce que ça le débutait, l'envenimait ?
D'autres extraits sont cités plus bas, y compris de violence assez foudroyante, crimes économiques, observations générales, honneur, statut social, amour, mariages, affaires...

Recherches
Si cet ouvrage s’adresse avant tout à un public universitaire, aux historiens et aux criminologues canadiens et européens, l'engouement pour le crime pourrait bien en élargir le public cible étant donné les exemples tout autant parce qu'il enrichit la connaissance générale sur le sujet de la criminalité de l'époque et sur les méthodes de règlements de conflits. À cet égard, on peut effectuer une recherche libre par mot-clé à l’intérieur de l'ouvrage à partir du site Internet de l'éditeur sur www.septentrion.qc.ca.


L'AUTEURE
Josianne Paul a obtenu son doctorat de l’Université d’Ottawa en janvier 2011. Elle poursuit maintenant sa carrière au sein de la fonction publique fédérale, tout en continuant à s’intéresser à la question de la criminalité en Nouvelle-France à titre de chercheure indépendante. Son premier ouvrage intitulé Exilés au nom du roi : Les fils de famille et les faux-sauniers, 1723-1749 a été publié aux éditions du Septentrion en 2008.


EXTRAITS (divisés en sous-titres pour n'en souligner que quelques-uns)

OBSERVATIONS GÉNÉRALES SUR LA CRIMINALITÉ EN NOUVELLE-FRANCE
« ... au-delà des expressions courantes de violence qui s’offraient à eux, les colons étaient capables de résoudre leurs différends [ce livre a pour but de] recenser les avenues que pouvaient emprunter les habitants de Montréal entre 1693 et 1760 pour résoudre les querelles » (Introduction)

« En Nouvelle-France, le crime et la criminalité étaient deux concepts définis à partir des discours normatifs tenus par l’administration royale et par l’Église. Tout d’abord, il faut dire que les discours de ces deux institutions étaient intimement liés » (p. 39, Définir ce qu’est le crime et revoir notre vocabulaire).

« Juridiquement les crimes étaient donc divisés en trois catégories, soit les crimes de lèse-majesté divine, les crimes de lèse-majesté humaine et les crimes contre les particuliers. (p. 43)

L'HONNEUR ET LES ABUS DE STATUT
« Les exemples précédents impliquaient des personnages ayant des statuts sociaux élevés qui réagissaient face aux comportements irrespectueux de gens qui leur étaient inférieurs. Il faut préciser que des querelles pouvaient aussi survenir lorsque des personnes au statut social inférieur se révoltaient contre l’abus d’individus faisant un usage excessif des privilèges que leur conférait leur position sociale. » (p. 66)

À DEUX FEMMES CONTRE UNE
« Lors de leur interrogatoire, les deux accusées ont avoué avoir fouetté avec des épines la plaignante » (p. 71).

LA VIE PRIVÉE, L'AMOUR : les mariages inacceptables pour la famille
« Le choix d’un partenaire représentait donc une étape cruciale dans la vie des colons de la Nouvelle-France. La sélection était particulièrement délicate et les situations-problèmes survenaient généralement lorsqu’un individu persistait dans son désir d’épouser une compagne jugée inappropriée par la famille. » (p. 78, Prévenir les mésalliances)

« La méthode forte n’était pas employée seulement par la famille immédiate, mais aussi par la famille élargie. » (p. 79, Prévenir les mésalliances)

LE COMMERCE
« En colère, elle s’en prit verbalement au marchand, qui la frappa violemment au visage avec une anguille, ce qui rendit la dame temporairement aveugle. » (p. 120, Les échanges de services)


Accéder directement à la fiche du livre
http://www.septentrion.qc.ca/catalogue/Livre.asp?id=3399 
L'ouvrage est disponible en formats papier et numérique, au choix du lecteur.


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