LIVRES : Éclats de voix . Une anthropologie des voix

Auteur : David Le Breton
Éditions Métailié, Paris

« À peine énoncée et entendue, elle a déjà disparu, elle ne laisse d'autre trace que celle de son souvenir plus ou moins fidèle. »


ANTHOLOGIE DE LA VOIX

La voix, c’est l'émotion, l’histoire, l’individu, ce sont ses éclats salutaires et son antithèse dramatique : le mutisme. La voix, c’est de la mise au monde, de la prise de pouvoir, de l'injonction, de la désignation, du sexe... Or la voix, comme le corps, s’écrit toujours au pluriel.

Une recherche pour grands utilisateurs de leur voix
Vraiment dans cette anthropologie, David Le Breton part à la rencontre de tous les aspects de la voix, depuis ses considérations physiques dans l'introduction, de son identité discutée dès l'Évangile ou dans la tradition de même que la position sociale ou encore en chants « supernatural ground des Eskimos » (p. 24). On y parle aussi de l'identité par l'accent, le sexe ou la hiérarchie ainsi que de nuances vocales, affectivité, maladie, peur, jugements de valeur et émotions.

Au deuxième chapitre, l'auteur raconte le foetus, le soi et l'autre, le bébé, les comptines et berceuses, et explique le passage du son au sens. En outre, après les citations de Denis Podalidès, Aristote, Descartes, Diderot et Sophocle dans l'introduction, l'auteur cite ici Freud, Labov, George Sand. Il explique quelques particularités selon certains lieux comme Barcelone, la Catalogne, la Gascogne. Les turbulances de la voix et les légendes d'enfants sauvages précèdent un troisième chapitre où l'on parle de cris et autre bris de la voix pour en arriver ensuite à la langue des signes, à l'amour et à la mort et même jusqu'aux ancêtres et aux moyens vocaux que l'on emploie en Afrique. Dans ces pages, on nous rappelle Jules Verne, Barthes, ainsi que Lady Chatterley (D.H. Lawrence) et Marcello Mastroianni.


Beaucoup plus qu'un survol de toutes les tonalités
Il s'agit vraiment du fruit d'une recherche approfondie dont on n'a mentionné ci-haut que quelques-uns des sujets abordés. Les mamans, enseignants, médecins spécialisés, professeurs, instituteurs, tuteurs, acteurs, conteurs, chanteurs et tous les métiers de la scène, de la radio et du cinéma porteront sûrement plus qu'un grand intérêt à ce livre qui parle de l'instrument de transmission de leur passion et qui paraît aujourd'hui chez Métailié Paris.


L'AUTEUR
David Le Breton est né le 26 octobre 1953. Il est professeur en sociologie à l'Université de Strasbourg, membre de l'Institut universitaire de France et du laboratoire URA-CNRS "Cultures et société en Europe". Il est l'auteur, entre autres, de : L’Adieu au corps, Anthropologie de la douleur, Du Silence, La Saveur du monde et d'un roman noir, Mort sur la route.


EXTRAITS

« L'émotion liée à l'écoute d'une voix ne titent pas à ses propriétés acoustiques mais à son impact sur le désir de celui qui écoute. » (p. 11)

« ... elle est perçue comme accessoire au regard de ce qu'elle énonce. » (p. 15)

« Pour les populations aborigènes d'Australie, la parole consacrée reconstitue en permanence le monde tel qu'il est perçu par un clan totémique... » (p. 27)

« Chez les Wolofs du Sénégal, les nobles parlent d'une voix basse et grave, sobre, à la différence des hommes ou des femmes de milieu plus modeste qui émettent une voix haut perchée et forte. » (p. 35)

« Le cri est une voix soudain privée de langage ou qui n'y a pas encore accédé. » (p. 119, Bris de voix)

« La fuite en avant d'une voix impossible à arrêter tant pour le locuteur que pour ses auditeurs, marque la volonté de faire un monde à soi, sans les autres. » (p. 125, Trop de voix)

« À peine énoncée et entendue, elle a déjà disparu, elle ne laisse d'autre trace que celle de son souvenir plus ou moins fidèle. » (p. 227)


Éditions Métailié, Paris
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